admin3528

27 juin 2018

Faut pas pousser le bouchon !

L’ouverture, c’est le nouvel an des pêcheurs. Un rituel sans chandelle pour les mordus qui font mordre à l’hameçon, pour les férus du barbeau, du gardon, de la tanche et du hotu. Qu’il vente, qu’il pleuve, qu’il gèle, que les narcisses hésitent à sortir leur couronne d’or, que les pâquerettes guillerettes se frottent le nez dans la rosée du matin, c’est l’ouverture de la pêche. Au petit matin, le jour à peine naissant, l’asticot frétillant connait déjà son sort, les bouteilles de Mennetou, de Quincy, de Reuilly aussi. Elles seront vidées sur le coup des 11 heures lorsque le bouchon de liège vernis sera lassé des allers et venus, fainéant et immobile dans le clapot docile d’une eau verdâtre. L’ouverture de la pêche, ce n’est pas qu’une histoire de fritures et de « brason » à moitié vide, à moitié plein. Certes, on se lève aux aurores quand le chien dort encore. On mouille les bottes pour lancer le fil et l’hameçon sur le fond vaseux mais c’est d’abord une histoire de copains qui resserrent les rangs et les crans d’une amitié. Il y a le temps de la pêche, du goujon taquiné, de la truite qui se défend cambrée puis il y a le temps de la pêche aux histoires de chacun. Les verres se remplissent, le vin blanc est sec et fruité. Les histoires rebondissent. La retraite de Pierre, les vieilles douleurs de Paul, la CSG débattue, les vacances en camping car tant attendues et la cataracte qui fait […]
27 juin 2018

Un jour d’haltères pour pépères

  A soixante balais passés, Normal d’en avoir bavé, d’en avoir brassé, On a tous des douleurs, des petites misères, On a tous des traversées du désert, A crever des abcès, à essuyer bien des malheurs, Râleur, piailleur, chialeur, miauleur. En saison des pluies, on se barre à la sauvette, Au printemps, on charge la musette, Y a du bordel, alors on jure comme un boss du cartel, Y a des médailles, des podiums, alors on joue les top models. Ils sont en piste, dans le feu, dans le jeu, inquiets, ils font la moue, Des pépés, gais, réservés, rasés au coup chou Des gueules de Johnny, des gueules de vicomtes, Des combattants de l’ombre, de la fonte, Ils ont toujours la barre, Pour des instants rares, A faire la guerre avec le gras, Merde, vieillir que c’est ingrat. L’haltéro, c’est comme l’héro, Ca vous prend au garrot, La main sur le fer, les poignets ferrés, Les pieds calés, les joues gonflées, Dans la lumière d’un corridor, A porter son poids à bras le corps, un record.   Rencontre à Decazeville (Aveyron) lors du championnat de France Masters d’Haltérophilie Voir le reportage complet 
27 juin 2018

Quand Nasty prend le micro à Massy

Je ne viens pas de la rue, je ne viens pas de Massy. Ca oui, je connais le stade, son tour de piste, ses couloirs. C’est un bon tour de ma vie C’est codifié, c’est militarisé, c’est unifié. J’en ai usé. J’en suis usé. Mais je ne connais rien du free style, du street workout, du double dutch, du free style foot ball. Quant au rap, oui ça me traverse, parfois ça me transperce. Mon dernier CD acheté, peut être le seul, ce fut Arrested Development Ce devait être l’album Unplugged sorti en 1993, ça fait une paie. Tupac, je n’ai même pas connu, je suis donc tout bonnement un ignorant. Alors j’ai essayé de comprendre dans cette salle Paul B. à Massy, Les tours de passe passe, Le vocabulaire corporel, L’état de siège, Le tourbillon des jongleurs, des danseurs, des brakers, …ils se veulent insaisissables. Comme pourchassés, en fuite. J’ai observé des gars tout en muscles faire la planche. Il aurait pu dire « je suis une force de la nature » C’est la danseuse Anne Nguyen de la compagnie Par Terre qui s’exprime ainsi. Elle ajoute même « je hoche la tête pour secouer les idées ». Pour émettre des signaux, psalmodier un langage des corps, calligraphier des mots. Ecrire son histoire, le quotidien de la ville, de la cité. Pour avoir son droit de citer.   Rencontre à Massy (Essonne) le 13 avril 2018 Voir tout le reportage
27 juin 2018

Un jour de Grand Prix sans chichi

  Cela me rappelle le Grand Prix de Chardoille. Félix Potin, c’était le ferrailleur du quartier de la gare, propriétaire d’une casse à Juva 4 où gamins, nous jouions les Al Capone. Felix, c’était Monsieur le président du club de vélo. Dans la campagne, d’Allogny à Quincy, de Reuilly à Neuvy, chaque dimanche, il plantait son petit décor. Avec sa gouaille, son TUB Citroën, sa boîte à outils et son crachoir pour annoncer le passage des coureurs. C’était l’époque des frères Villepelet. Des paysans de la plaine du Berry. Des costauds, des rustiques, des cuissots de taureaux. Forgés au lever de bottes de paille, à la charrue et aux hivers humides au cul des vaches. Des malins, des roublards se partageant, de Pâques à la Toussaint, primes, victoires et coupes de pacotilles. Parfois Jean Graczyck venait dire le bonjour et se jeter vite fait, quelques verres de gris, du Quincy, du Mennetou, du Reuilly. En voisin, il habitait Vignoux sur Barangeon, pour serrer des paluches, pour conter des histoires de chasse patate. Avec sa gueule creusée, taillée au coupe chou, quinze ans pro en passant chez Lejeune, chez Bic et chez Ford. Sacré Popoff, une carrière de puncheur, sept « Tour de France » et 5 victoires d’étape, ça classe, la classe. Déjà, on se garait sur le bas côté de la chaussée. Des 4 CV, des Dauphines, des Arondes. On pissait dans les fourrés. On se graissait au Laodal. Les vieux sortaient les chaises rempaillées et mâchouillaient des tiges de blés […]
27 juin 2018

L’or blanc vaut mieux que le lait caillé

  « J’aurai 80 ans cette année ». Monsieur Plagnard se frotte la pomme des mains en murmurant ces mots. Comme si à chacune de ses respirations, il guettait l’inconnu « 80 ans, ça change tout. C’est plus la même chose ». Chaque année, entre le Circus et la Cap, Monsieur Plagnard m’offre le café. C’est un rituel, comme de mettre un cierge dans une petite chapelle, pour voir scintiller une flamme tremblante dans la pénombre des lieux, sans mot dire, sans rien se dire. Lui et son épouse habitent la ferme familiale de la Vincente. Il y est né, à l’arrière de ce qui est aujourd’hui une étable. Au pied de ces immenses alpages où le toit des burons brille parfois comme des loupes lorsque le soleil levant fouette et embrase le pic de Gudette. Le café, il le sert à la casserole tout juste sortie du feu. Habituellement, il propose un gâteau sec. Autre rituel que de tremper le biscuit sorti d’une boîte en fer, comme une offrande, une oblation. Mais pas cette fois. Raymond Plagnard est né au temps des hivers qui fissurent les plafonds de verre. Au temps des chutes de neige où le manche de pelle poli par la corne prend la forme des mains rugueuses et calleuses. Au temps des printemps humides, encore neigeux, souvent « brouillasseux » qui se font attendre, qui rendent les hommes, les femmes hargneux et grincheux. Raymond est donc né dans la montagne, au pied du Fer à Cheval. […]