Arnac sur Dourdou

9 janvier 2020

« ici on est bien dans notre petit coin ! »

  Arnac sur Dourdou, au pays des fraiseuses   Première à gauche au premier lampadaire, une forte descente, la mairie d’Arnac sur Dourdou se cache en contre bas du village. Au bord d’un vaste pré et de petits jardinets où les herbes folles se sont recroquevillées dès les premières gelées. Passé une ruine, une petite flèche en bois indique de contourner sur la droite le long du feuillage. Autrefois, cette habitation abritait l’école communale, au temps ancien des instits à la règle légère, des élèves au piquet et oreilles frictionnées où les cours élémentaire et moyen ne faisaient qu’un. Ce petit bourg allongé au déboulé du Rimoustel, un ruisseau sauvageon échappé des escarpements du Roc Bituir, ferme la marche au rang des villages les moins peuplés de l’Aveyron. 34 habitants seulement, 34 survivants, 6 à l’année au village, 11 à La Mouline, vu de Rodez, la capitale et son musée Soulages, à deux bonnes heures d’une route sinueuse, ce n’est que bouchée de pain d’un aigre levain dans la France des oubliés. Aujourd’hui lundi, Fernande Singer est à son bureau de Maire. A sa droite, la secrétaire met en forme le prochain bulletin municipal, les élections approchent et Guy Sales, un ancien cheminot, l’un des sept élus au conseil s’arrache les yeux sur le plan cadastral à la recherche d’un vieux sentier communal. Au fil du temps, Arnac a perdu son école, son curé, son bistrot, sa culture des fraises qui faisait du village un petit paradis «c’était la richesse […]
16 décembre 2019

je veux juste rester perchée

  J’aime les petites routes qui se la coulent douce, louvoyantes, coulantes, dans une nature qui glousse tendrement. La D12 entre Camarès et Brusque est de celle-ci. Vu du ciel, ruban noir sinueux presque paresseux, plaqué en fond de vallée. Tout en courbes et déliés comme une écriture fine, cherchant une porte de sortie, sans exclamation, sans point d’arrêt. Passé Brusque, passé les vieux entrepôts Rouquette, elle passe de 12 à 92 et devient coquine et cabotine. Elle perd de sa largeur, elle prend de la hauteur. La vallée se creuse, en contre bas, le Dourdou bordé dans son lit, n’a plus aucun garde fou, impétueux et sinueux, assaillant et fracassant. J’écoute Alex Beaupain, il chante «cours camarade, le passé est derrière toi». Le mot «cours» me fait bien évidemment sursauter. Il fait sombre, je mets les phares, il enchaîne «le vieux monde sent la poussière». La mélancolie de Beaupain colle au pare brise comme une nuée de moucherons un soir d’été ronchon. Je passe Arnac sur Dourdou. Est-ce le vieux monde ? La plus petite commune de l’Aveyron, trente cinq habitants, seulement six à l’année. Sont-ils vénérables, adossés à leur passé, sans pacte ni compromis, sans truquage ni pont levis ? Je passe vite, je me promets de revenir. Que l’on me conte l’histoire du charretier Cros, du curé Cloustaquart, de Caïfa, le marchant ambulant…Beaupain fredonne encore « le passé est derrière toi». J’aimerai le contredire. Le passé est bien devant moi. J’étais prévenu, la D92, c’est la route […]