Voix divine, effilée, aiguisée au fusil diamant, la voix de Christophe, c’est un aimant transperçant. Sifflement strident d’une flèche perdue. Bruissement larmoyant d’une pluie de verre concassé. Elle vous crucifie sans aucune pitié. C’est un vol de flamands roses, en rafale, en cabale. Elle vous aspire, elle vous brasse dans une spirale de mille octaves. C’est un flirt avec le vide, sous vos pieds, un voile opaque de paraffine, c’est si fragile. Route de Peyre, j’écoute Christophe en duo avec Arno «Dans ma veste…De soie rose…Je déambule morose…Le crépuscule est grandiose…». Je suis d’une humeur gaie, la mélodie glisse dans mes tympans, grinçante. Danger, c’est du verre pilé, je suis en prise, je glisse allègrement. Docilement, je fais allégeance à la beauté des mots. Arno chante rugueux, fiévreux, d’une lente mélancolie infinie, syllabes martelées, voix rauque ruinée par mille fagots de vieux mégots «Peut être un bon jour…Voudras tu…Retrouver…Avec moi…Les paradis perdus». Comprégnac, je rentre dans la salle des fêtes. Je croise Christophe habillé d’un rose soyeux, jambes nues, poilues, torse nu, poilu. Ce n’est pas le Christophe «dans sa veste de soie rose», le dandy électro pop miné par la mélancolie, longues et maigres phalanges ricochant sur le clavier. Devant moi, inattendu, c’est le Christophe de nos champs et campagnes, le Christophe de nos villages, de nos rivages, dans cette vallée du Tarn qui redoute l’étiage. Ce n’est pas le Christophe «qui déambule morose», lunettes fumées, regard embué, «le regard qui désarme». Christophe, devant moi, torse puissant, n’appuie […]