Millau-vid

10 avril 2020

Je te l’ai dit…

MILLAU-VID     Ce matin sous les halles, j’ai croisé Fabienne. Ce n’est pas habituel. En réalité, on ne se croise jamais. Et là, en si peu de temps, deux fois de suite, le temps d’échanger entre deux étals, une tranche fine d’un petit bout de vie confinée. Le temps qu’elle me donne le contact de sa sœur Marie, une artiste plasticienne reconnue qui en ces temps d’introspection ouvre quotidiennement un petit atelier d’écriture. Au 25ème jour du confinement, celle-ci débutait son message par ces mots : voici la consigne, écrire un poème commençant par «je te l’ai dit…comme «je te l’ai dit pour les nuages« de Paul Eluard. Pour accompagner ces photos prises dans les rues de Millau lors de la quatrième semaine du confinement, j’ai pris mon stylo et moi-aussi, je me suis jeté à l’eau…   Je te l’ai dit pour les masques, Ca n’évite pas les grimaces, ça n’évite pas les bourrasques. Je te l’ai dit pour les gants, Ça ne desserre pas les carcans, ça n’évite pas les ouragans. Je te l’ai dit pour les distances, Ca ne supprime pas les confidences, ça ne supprime les défiances. Je te l’ai dit pour le gel, Ca ne recolle pas les vieilles semelles, ça ne colmate pas ce grand bordel. Pour les visages écarquillés, les regards familiers, Pour les mains gercées, les phalanges tétanisées, Pour les pieds martelés, les orteils ankylosés, Pour le vent, l’air, le souffle respiré, empoisonné. Je te l’ai dit, tu m’as dit «approches […]
6 avril 2020

Le bon petit soldat est en colère

  MILLAU-VID     Ce matin, je me suis levé tôt. C’était Bagdad, les pensées, le moral en chicane. L’air était frais, le soleil déjà en échappée belle, des oiseaux matinaux à tire-d’aile, j’ai pris mon sac, mes gants, mon bonnet et j’ai marché pour m’apaiser. Voilà à quoi j’ai pensé.   Comme organisateur de courses à pied, je pense avoir été un bon petit soldat. Tout au moins je l’espère, même si parfois j’ai dû commettre des erreurs et des faux pas. J’ai tracé une route, des chemins, je suis heureux d’avoir été ainsi suivi sur les Templiers, sur l’Aubrac, sur le Viaduc, après avoir posé en toute simplicité des balises, des jalons de vie, de plaisir et de passion. J’ai payé ma TVA, mes impôts, mes taxes comme il se devait, Tout en fournissant mes comptes dans les bons délais. J’ai chiné, j’ai fouiné, j’ai ferraillé sur ces causses. Je pense avoir respecté comme il se devait cet univers, cette terre que j’ai caressée, époussetée, même si parfois j’ai été violemment pris à partie et critiqué. Mais qu’importe. Je pense m’être plié aux réglementations, à ces chartes, cahiers des charges, plans de sécurité, règles environnementales, dossiers sur dossiers que sais-je encore… sans vraiment renâcler même si parfois nous avons dû faire face à l’incompréhension, au mépris, à l’autoritarisme, à la mesquinerie. Nous avons courbé l’échine, nous avons résisté.     Comme chef d’entreprise, je pense avoir été un bon petit soldat. Tout au moins je l’espère même si […]
5 avril 2020

7 cartes en main, 7 permis de vivre de la terre

  MILLAU-VID   Il y a parfois des petites phrases anodines qui s’accrochent à votre mémoire. Elles peuvent même s’accompagner d’une image, d’un objet insolite ou familier, d’une odeur saisissante, d’une saveur, d’une mélodie des champs ou d’un bruit assourdissant pour résister ainsi à toutes les épreuves du temps. . «J’aimerais courir les Templiers». Cette phrase, je ne la relie à rien mais je m’en souviens. Pas de date précise, non, mais du jour oui, un vendredi, jour de marché, Place Foch, devant l’étal de Loïc Alméras à acheter asperges et radis, celui-ci d’ajouter «Les Templiers, ça me tente». Je l’avoue, j’ai douté car l’homme devant moi, je l’avais enfermé, sans réfléchir, là tel que je le voyais, en maraîcher, ni plus, ni moins, sans supposer qu’il puisse en short et jambes nues, se parer d’un dossard et d’une tenue Templiers. Sauf que l’air de ne pas y toucher, ce bon caussenard rustique, malin et curieux termine quelques mois plus tard 316ème au classement final. Il se trouve que cet après-midi là, au hasard de mes allées et venues le long de la Bergerie, je l’ai vu franchir la ligne d’arrivée, frais comme un goujon et heureux comme un vairon frétillant dans l’eau claire de la Dourbie. Je lui demande son temps «10h34’… !!!». J’ai ouvert de grands yeux, je me suis incliné pour le féliciter, au fond de moi, bien morveux d’avoir douté de ses capacités, complice de vieux clichés.   J’aurais pu rencontrer Loïc Alméras à la Tindelle, ce […]
4 avril 2020

Alors, on organise ou bien nous annulons ?

MILLAU-VID   L’interview d’Edouard Philippe ne les a pas vraiment rassurés. De toute façon, quelques peuvent être les bons mots pour apaiser les doutes ? Quelques peuvent être les bonnes mesures à annoncer coincées entre illusion et pragmatisme d’Etat ? Au final, que reste-t-il de ce blabla formaté, conditionné que l’on vous sert sur un plateau télé vous assommant comme un triple shot d’alcool fort ? Pas grand-chose, si ce n’est rebondir ou esquiver, se répéter une litanie de mantras pour meubler une soirée aux aguets et embrumée qui se résume à une phrase interrogative simple «Rien ne peut y faire, alors on fait quoi ? Rien ne peut y faire, alors on fait quoi……?».   Arnaud et Jean François n’ont donc pas trouvé la réponse à cette question simple «Alors, on organise ou bien nous annulons ?». Pas même en une soirée, pas même en une nuit, pas même en une journée, cette question sans réponse comme gravée sur un disque rayé «Alors, on organise ou bien nous annulons Trail En Aubrac ?».   Revenons tout d’abord à cette soirée du 20 novembre 2019 dans les bureaux des Templiers. La grosse quinzaine de chefs de poste est conviée à une réunion de travail dans la grande salle de réunion. L’Hivernale est proche, trois semaines, c‘est presque demain, l’odeur du Roquefort se fait déjà sentir à nos babines. Après l’annulation des Templiers, ce soir là, l’équipe se soude autour d’une promesse, le sort sera conjuré, les dernières plaies seront cicatrisées, […]