14 heures, l’heure des dernières frites alanguies pataugeant dans les persillades refroidies. 14h, l’heure de la descente à la mer, le père, la mère, la marmaille, cap sur la plage, sous la canicule, ambiance crème solaire et humeur aigre, amère. 14h, au Tenchadou, ce n’est plus l’heure de plaisanter. Dans ce local, où autrefois, les pêcheurs teignaient les filets lorsque les cordages se tressaient d’un coton écru, c’est l’heure du défilé. Les hommes se sont habillés de blanc, dans le respect de la tradition. Des chaussures de toile, au slip en passant par la cravate que David Aprile, l’un des chevaliers de la mer, illustre vainqueur de la St Louis, tend à chacun. On ajuste col de chemise, manches de marinière et nœud de cravate. David l’intrépide laisse glisser « en les voyant tous en blanc, j’ai eu les larmes aux yeux ». 14h 30, c’est donc l’heure venue des jouteurs. Rassemblés, bien alignés, au son du hautbois et du tambourin, poings fermés sur la lance coincée dans le pli de l’haine, drapeaux l’un bleu, l’autre rouge, au carré dans le vent, ils rejoignent le Lez, ce canal aux eaux vertes se jetant dans la Grande Bleue, face à la statue des Pêcheurs. « Quand tu es là haut, tu as le sang qui boue ». Eperonné en juin, « coccyx », c’est son surnom, se remet d’une vilaine blessure aux cotes. Aujourd’hui, dans une barque bleue, virevoltant à bâbord et à tribord de ces deux gros bateaux de combat, il ramasse pavois et lances […]