Millau

7 avril 2020

On retrouvera le chemin de la vie

MILLAU-VID   «C’est vide comme le matin. C’est vide comme un matin qui dure. On se dit encore un matin pour rien. C’est impressionnant, c’est une ville qui s’éteint. Mais je crois en la sortie. On retrouvera le chemin de la vie» Ne chercher pas, ce ne sont pas les paroles chopées sur la scène du Club-Club, un bar de Pigalle, où les slamers aux « grands corps malade » déballent leur colère, leur vague à l’âme où leur amour perdu. J’ai face de moi, à deux tables de mon calepin, Hubert Henry, seul dans sa Brasserie. Dans cette immense salle de restaurant à la déco chic-rétro, en d’autre temps ce serait Happy Hours, aujourd’hui, malgré la crise, ce n’est pas pour autant soirée « Mauvaise Humeur ».  Je lui lance des mots à la volée, il reprend en ligne de fond, en amorti : « le silence ? » « le silence, ça me rappelle quand j’étais seul sur le chantier en fin de journée, les portes fermées. « l’odeur ? » « c’est l’odeur d’un endroit confiné qui aurait besoin d’une ventilation L’agitation ? » « je le dis souvent, quand je suis derrière dans mon bureau, je sens que ça vie, que ça bouge, c’est intuitif, c’est comme une perception ». La Brasserie Le Bureau, c’est la tête de pont de l’Espace Capelle, la proue, l’étrave de cette immense barge commerciale. Depuis le vendredi 14 mars, Hubert Henry a jeté l’encre, le bateau à quai au pied de la Pouncho, les cordages tendues par-dessus la jetée, les nœuds de taquet bien serrés pour […]
6 avril 2020

Le bon petit soldat est en colère

  MILLAU-VID     Ce matin, je me suis levé tôt. C’était Bagdad, les pensées, le moral en chicane. L’air était frais, le soleil déjà en échappée belle, des oiseaux matinaux à tire-d’aile, j’ai pris mon sac, mes gants, mon bonnet et j’ai marché pour m’apaiser. Voilà à quoi j’ai pensé.   Comme organisateur de courses à pied, je pense avoir été un bon petit soldat. Tout au moins je l’espère, même si parfois j’ai dû commettre des erreurs et des faux pas. J’ai tracé une route, des chemins, je suis heureux d’avoir été ainsi suivi sur les Templiers, sur l’Aubrac, sur le Viaduc, après avoir posé en toute simplicité des balises, des jalons de vie, de plaisir et de passion. J’ai payé ma TVA, mes impôts, mes taxes comme il se devait, Tout en fournissant mes comptes dans les bons délais. J’ai chiné, j’ai fouiné, j’ai ferraillé sur ces causses. Je pense avoir respecté comme il se devait cet univers, cette terre que j’ai caressée, époussetée, même si parfois j’ai été violemment pris à partie et critiqué. Mais qu’importe. Je pense m’être plié aux réglementations, à ces chartes, cahiers des charges, plans de sécurité, règles environnementales, dossiers sur dossiers que sais-je encore… sans vraiment renâcler même si parfois nous avons dû faire face à l’incompréhension, au mépris, à l’autoritarisme, à la mesquinerie. Nous avons courbé l’échine, nous avons résisté.     Comme chef d’entreprise, je pense avoir été un bon petit soldat. Tout au moins je l’espère même si […]
29 mars 2020

Que va-t-il nous rester de ces airs de Douala ?

  MILLAU-VID   Petite ballade autour de la Pouncho et dans Millau, le jour où j’apprends la disparition de Manu Dibango à l’âge de 86 ans, emporté par le virus. Quelques mots rien que pour lui que j’ai tant aimé et écouté.   Une Pouncho sans Manu Dibango, Boss, ta bien droit à un dernier coup de chapeau. Sur Baobab Sunset, T’avais fait main basse sur le makossa, Merci, dans Bolingo City, on s’est gavé à grands fracas. Une Pouncho sans Manu Dibango, Boss, j’vais encore m’enfiler un verre de porto. Déjà que Francis Bebey nous a filés dans les doigts, Que va-t-il nous rester de ces airs de Douala ? Une Pouncho sans Manu Dibango, Boss, t’as joué du twist, du blues, du funk, du mambo, mambo. T’as même accompagné Nino Ferrer et Gainsbourg, Mais putain aujourd’hui, dernier rideau, sans ton saxo, c’est peut être le grand jour, mais c’est sans retour. Une Pouncho sans Manu Dibango, C’est comme Soweto sans Ladysmith Black Mambazo. Boss, t’étais un costaud, t’as même failli de faire piller par Rihanna, Mais là haut, tu peux lui faire un doigt, tu seras toujours Mister Black Makossa.     Textes et photographies réalisés le 24 mars 2020 dans les rues de Millau au 8ème jour du confinement
24 mars 2020

La nuit, la ville est fragile comme une meringue

  MILLAU-VID   Millau la nuit…. Y’a qu’un putain de silence pour chasser les ragots, Y’a encore trop de schizos, des paranos, esseulés, des accros, beaucoup trop, La langue chargée, de la morphine pour glisser dans le vide, La nuit, on creuse le vide, on compte ses rides. Millau la nuit.. Y’a plus de p’tits sourires, même une petite seconde, Y’a plus de flics qui parfois roulent en trombe comme pour un vol de Joconde, Y’a plus d’hommes le dos rond, tirant sur une blonde, La nuit n’est plus féconde, j’ai peur d’une hécatombe. Millau la nuit… Y’a plus de marguerita qu’on mange avec les doigts, Y’a plus de tacos, franchement, y’a pas d’quoi être aux abois, Y’a plus de burger, frites, coca, T’inquiète, la nuit, la ville fait encore du gras. Millau la nuit… Y’a même plus un seul homme pissant la bière, Y’a même plus un seul chat de gouttière, Y’a q’des ronds points qui tournent en rond, La nuit, pitié pour mes voisins, j’aimerai crier et souffler dans un clairon. Millau la nuit… Y’a plus de dingues qui roulent comme des dingues, Y’a plus de jeunes dans la picole, dans la déglingue, Reste des insomniaques muets et sourdingues, La nuit, la ville est fragile comme une meringue.    Texte et photographies, Millau le 21 mars 2020 au 5ème jour du confinement
4 mars 2020

Millau 2020, « La démocratie, ça s’apprend »

  MILLAU 2020 Petite leçon d’histoire constitutionnelle et jeux de rôle. Balayage et dépoussiérage sur les types de suffrages. « QCM » à choix simples, à droite les pour, à gauche les contre. Ou l’inverse. Petits brassages d’idées, de convictions. Des groupes se forment, débat rapido sans micro, le temps est minuté, conclusion et changement de camp si besoin. Une question : qui est engagé dans l’action sociale plus exactement dans la vie de la société ?   Comme sur un parvis de cathédrale, le groupe se divise en quartiers. Un militant monte sur une chaise « je suis le beffroi ». C’est informel, assemblée mouvante, chacun piétine, Millau se divise à plat. On rajoute des tables, une pour les expatriés de la campagne. Six quartiers reconstitués, six groupes formés pour un exercice de démocratie directe. Au micro, un militant l’affirme « La démocratie, ça s’apprend ».   Photographies réalisées le 3 mars dans la chapelle du Créa (Millau) dans le cadre de la campagne électorale pour les Municipales menée par la liste conduite par Camille Valabrègue et Benoit Sanchez Mateo